Même en Suisse l’armée tue !

Le décès d’une recrue vendredi, la troisième en une année à la caserne de Bière (deux crises cardiaques et un suicide), met crûment en lumière ce que vivent les recrues durant les premiers jours de leur service militaire.

Dans le plein respect dû à la victime, nous tenons maintenant à le dénoncer : « La plus belle armée du monde », celle d’Ueli Maurer, n’a ni dignité ni égards pour les personnes qui la servent : elle les met à l’épreuve, parfois jusqu’à la mort !

Ce n’est pas le fruit du hasard si une recrue est décédée, mais le résultat d’une politique systématique. Trois fois par année, à chaque début d’école de recrue, le GSsA est témoin d’une forme grave de maltraitance médicale. Notre permanence reçoit alors environ 3 à 5 appels de personnes en détresse face aux exigences – et surtout face à l’intransigeance ! – militaires. Il est fréquent que les autorités militaires refusent les rendez-vous médicaux lors de la première demande et il est quasiment systématique de devoir attendre la deuxième semaine d’école de recrue pour avoir rendez-vous avec un médecin ou un médecin spécialiste, en particulier un psychologue ou un psychiatre. L’idéologie selon laquelle « à l’armée, on forme des durs ! » prévaut sur toute forme de respect des personnes et de leur santé ou plus largement sur toute forme de prévention réelle des accidents qui peuvent survenir durant les premiers jours d’école de recrue. (La prévention est rarement le problème de l’adjudant qui fait faire les exercices ou qui supervise les chambrées).

Les chiffres de l’armée parlent d’eux-mêmes, puisque c’est 10% de l’effectif que l’armée perd durant l’école de recrue, la plupart au début de celle-ci. Vu ce taux d’échecs très élevé et le peu qui est fait pour les éviter, il n’est hélas pas surprenant que des décès se produisent.
La question de savoir pourquoi ils se produisent à Bière doit aussi être posée. D’autant plus que contrairement à ce qu’a prétendu le colonel responsable (24 heures du 9 juillet), nous savons qu’une marche forcée a bel et bien eut lieu à Bière le jour où cette recrue a fait sa crise cardiaque (nous avons eut une consultation à la permanence le lendemain de cette marche à propos de celle-ci). Et que dire des nombreux blessés dont on ne parle jamais ? Par exemple, nous savons aussi que le 5 juillet lors d’un exercice improvisé à la caserne de Dübendorf, 6 recrues sur 110 se sont évanouies, l’exercice devant alors être interrompu.

Si le service militaire n’était pas obligatoire, on pourrait aller jusqu’à dire que la façon dont l’armée traite son personnel ne regarde qu’elle et les personnes qui veulent bien s’y soumettre. Par contre, imposer de tels traitements à des personnes qui sont obligées de servir est indigne de la Suisse et d’une société démocratique. C’est une des raisons pour lesquelles nous demandons la fin de l’obligation de servir.

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